François Bayrou vient appuyer Emmanuel Macron et condamner François Fillon au moment où ce dernier commençait juste à redresser la tête.

Quand François Bayrou joue avec son hologramme, avec cette part de lui gonflée d'un destin présidentiel, pour créer la surprise, alors naît l'événement politique. Le « sacrifice » de Bayrou pour Macron a du poids parce que chacun sait combien le maire de Pau appartient à la race des politiques qui d'habitude ne renoncent jamais. Il a renoncé. Et choisi pour le dire des mots que chacun ressent dans cette campagne déliquescente  : « gravité », « démocratie en danger », « décomposition », « flambée de l'extrême droite ».

Un événement est-il tournant? Sur le papier pas forcément. François Bayrou renonce à sa quatrième campagne parce qu'il a vu la violence du coup de balai qui a emporté Sarkozy, Juppé, Hollande et Valls. Ses sondages n'étaient pas bons. Son livre, « Résolution française », a peu fait parler. Mais dans ce moment si troublé, la voix du sage qu'il sait être quand il oublie l'Elysée peut porter. Clivage gauche droite ? Non, la campagne se joue dans le « non » à Le Pen, et dans la construction « d'une véritable alternance des pratiques et des orientations », dit-il. Au moment où le doute s'installe sur la capacité d'Emmanuel Macron à tenir le rang présidentiel, François Bayrou vient adouber le « petit », dire qu'il a vu juste dans son analyse des malaises Français et la montée de nouveaux clivages.

Tout le monde ne fait pas ça

Il vient surtout porter un coup terrible à son principal adversaire,François Fillon , qui commençait juste à dépasser ses ennuis judiciaires. Bayrou et Macron font alliance, c'est une chose, mais ils la scellent sur la moralité, c'est-à-dire contre François Fillon. Les mots sont durs. François Bayrou condamne les pratiques révélées dans le Penelopegate sans attendre les conclusions de la justice, et embarque tout ceux qui, à droite, acceptent de passer l'éponge en disant que « tout le monde fait ca ».

Il y a bien sûr de la rancoeur dans la décision de François Bayrou, qui n'a pas aimé être cloué au pilori de la droite, dans la primaire, pour avoir voté Hollande en 2012.  Mais il y a aussi de la conviction. Au fond, François Bayrou se sacrifie moins pour Emmanuel Macron que pour ses idées et son attachement de toujours à une conception morale de la politique. C'est pour cela qu'il fait mal... même s'il est encore trop tôt pour savoir si, pour François Fillon, ce mal sera fatal.